pierre philosophale

Pour certains, la pierre philosophale est un mythe. Pour d’autres, c’est un simple symbole de transformation. Les alchimistes opératifs quant à eux y voient une réalité concrète. Quelle est donc traditionnellement la part du réel et de l’imaginaire? Et que peut-on penser de ces trois visions divergentes? Pour le comprendre, je vais vous dévoiler les différents visages de la pierre philosophale, du plus connu au plus secret. Nous verrons ainsi que les trois définitions précédentes se recoupent et ne sont pas forcément antagonistes.

La pierre philosophale est-elle un mythe?

Dans une certaine mesure, je répondrai oui.

Cela pourrait étonner de la part d’un alchimiste. Mais c’est pourtant ce que je pense quand je lis certain articles ou livres consacrés au sujet. 

Une chose est certaine cependant. Malgré les nombreuses transmutations réalisées publiquement par les alchimistes à travers l’histoire, personne n’a pu encore prouver de façon formelle l’existence de la pierre philosophale. 

De fait, il est tout à fait normal que celle-ci fasse l’objet de fantasmes et d’interprétations en tout genre.

Cependant, on a oublié une chose importante. 

En se concentrant uniquement sur le phénomène de la transmutation ou de la panacée universelle, les investigateurs sont passés à côté du principal intérêt que représente la pierre philosophale. 

Je parle ici de l’adjectif «philosophale» lui-même. Accolé au mot «pierre», il aurait dû interpeller beaucoup plus les chercheurs, car il offre une piste de réflexion intéressante.

En effet, comment une chose aussi tangible qu’une «pierre» puisse être en même temps aussi abstraite que la «philosophie»?

Voilà un paradoxe qui accrédite du coup la version mythique.

MAIS, dans ce cas, on peut aussi retourner la question dans l’autre sens.

Comment une chose aussi abstraite que la philosophie puisse prendre la forme d’une pierre?

Cette question va nous conduire au deuxième point.

Est-ce que la pierre philosophale est un symbole de transformation?

La plupart des gens qui s’intéressent à l’alchimie veulent savoir comment faire la pierre philosophale. Ils veulent trouver la pierre philosophale comme on trouve une pépite d’or dans une rivière. C’est-à-dire au petit bonheur la chance.

Mais ça ne marche pas comme ça, car l’alchimie est tout sauf une discipline empirique. Le hasard n’a rien à voir là-dedans. 

Et l’alchimiste n’est pas non plus un Thomas Edison qui a testé plus de mille sortes de filaments pour créer la première ampoule électrique.

En effet, le véritable alchimiste sait ce qu’il fait, comment il doit le faire, et pourquoi il doit le faire ainsi…

Vous me direz sûrement que, dans ce cas-là, pourquoi la pierre philosophale n’est-elle pas encore brevetée?

La réponse est simple : l’alchimiste n’est pas un scientifique qui fait des expériences jusqu’à ce qu’il trouve ce qu’il cherche. Cette vision appartient aux légendes et non à la réalité.

Je m’explique.

La différence entre Thomas Edison et Nicolas Flamel

Thomas Edison aurait très bien pu faire ses tests électriques en mangeant un sandwich ou bien en écoutant Chérie FM. Ce que je veux dire par là, c’est que, peu importe ce que pense ou fait Thomas Edison au moment de son expérience. S’il branche le fil rouge sur le bouton vert, ça va marcher.

Mais pour Nicolas Flamel, de telles conditions ne fonctionnent pas, car l’alchimiste doit faire partie de l’expérience.

Pourquoi? Parce que la pierre philosophale ne peut pas être réalisée sans que le processus de transformation touche également l’alchimiste qui opère.

Cela signifie une chose fort étrange. L’alchimiste et sa pierre philosophale ne font qu’un, contrairement à Thomas Edison qui aurait eu bien du mal à entrer dans son ampoule…

A ce stade, on peut comprendre que la pierre philosophale représente pour beaucoup un simple symbole de transformation universel. Les multiples courants de la psychologie moderne reprendront d’ailleurs cette idée. Notamment par le biais des travaux de C.G Jung sur lequel je reviendrai dans un autre article.

La pierre philosophale dans les voies internes

Les alchimistes sont formels. La pierre philosophale existe aussi sous une forme concrète. Elle ressemble à un cristal rouge ou quelquefois à une poudre orangée d’aspect métallique. D’autres artistes l’ont obtenu sous forme liquide et l’on parle alors d’élixir.

Qu’en est-il exactement?

Il est très pratique d’envisager l’existence d’un produit aux vertus miraculeuses qui réglerait tous nos problèmes de santé et d’argent. Cette pensée appartient à l’imaginaire collectif et puise son origine dans les grands mythes de l’humanité. 

Comme tout ce qui a trait à l’irrationnel et à la magie, l’alchimie s’inscrit donc bien elle aussi dans cette optique de proposer à l’homme un moyen surnaturel pour vaincre les adversités de la vie.

Cette situation n’a pas échappé à ces alchimistes qui pratiquent ce qu’on appelle les voies internes ou alchimies spirituelles. À la frontière du symbolisme et de la physiologie, les alchimistes internes (les taoïstes à leur tête) considèrent que le corps humain — et parfois uniquement son psychisme — constitue le véritable laboratoire des opérations alchimiques.

Vers une pierre philosophale humaine…

Selon cette vision, la pierre philosophale perd ses caractéristiques tangibles au profit d’un concept plus abstrait. C’est la conscience — ou l’âme — de l’adepte, considéré comme materia prima, qui devient la pierre philosophale après un long travail sur soi. Les opérations du laboratoire chimique symbolisent ce travail.

Dans l’alchimie interne, les ustensiles, les cornues et les distillateurs du laboratoire alchimique sont donc de pures allégories. Ils permettent de définir les étapes du Grand-Oeuvre alchimique et de s’en faire une idée précise.

Dans ce contexte, les calcinations, cohobations et autres triturations correspondent aux différents mouvements et transformations de la conscience au service du développement spirituel.

Il s’agit donc d’un processus à la fois concret, car il est censé produire une modification de la physiologie cérébrale. Il est aussi abstrait, car ayant trait à l’éveil des capacités spirituelles de l’homme. 

Autrement dit un résultat que les Anciens auraient considéré comme étant «philosophique», d’où l’appellation de pierre philosophale.

La pierre philosophale dans les voies externes

Tout cela signifie-t-il qu’il n’existe finalement pas de petite poudre rouge ou d’élixirs merveilleux?

Bien sûr que si.

En parallèle de tout ce qui vient d’être dit, il existe bel et bien une alchimie de laboratoire. On y utilise vraiment des appareillages de chimie pour fabriquer des produits alchimiques bien réels.

En revanche, si l’on parle d’alchimie, c’est bien pour signifier qu’il s’agit d’autre chose que de chimie classique.

Par conséquent, la pierre philosophale des voies externes ne saurait correspondre à quelque chose qu’il soit possible de réaliser dans un laboratoire de chimie classique. 

Sinon, cela voudrait dire que n’importe qui connaissant la recette secrète de la pierre, pourrait la réaliser ou la faire réaliser à grande échelle. Et alors, il y a longtemps que le produit du Grand-Oeuvre hermétique serait passé dans le domaine public. 

Or, ce n’est pas le cas.

La pierre philosophale de laboratoire existe donc. Mais l’honnêteté me porte à préciser qu’elle n’a rien à voir avec les légendes ni avec ce que l’imagination populaire a colporté jusqu’à nous.

Ce serait mentir que d’accréditer de telles choses à notre époque. Etant donné que cela n’invalide pas du tout les pratiques de laboratoire. En particulier lorsqu’elles sont intégrées avec sérieux et objectivité dans le processus complet du Grand-Oeuvre, qui est à la fois spirituel et matériel. D’où son originalité et sa spécificité dans l’univers des voies spirituelles.

Un processus dont l’objectif, rappelons-le, n’est autre que la transmutation générale du monde, à laquelle l’alchimiste participe à sa manière.

Pas une, mais DES pierres!

Voilà pourquoi il me semble important de faire la part du rêve et de la réalité lorsqu’on parle aujourd’hui d’alchimie, et surtout quand on l’enseigne.

Les chercheurs doivent prendre conscience qu’il n’existe pas UNE pierre philosophale qui résout tout, mais plusieurs produits alchimiques, aux vertus très différentes selon les règnes de la nature qui les ont vus naître.

À ce titre, on parle traditionnellement de pierres métallique, végétale ou humaine. Ces  trois composés sont réalisés selon des protocoles très différents pour des usages eux aussi distincts. 

Les alchimistes s’en servent pour augmenter leurs évolution et capacités spirituelles. En outre, elles facilitent aussi leur transmutation personnelle au niveau corporel.

Par ailleurs, il se trouve que les processus de fabrication des pierres de laboratoire apportent nécessairement des connaissances particulières concernant les lois de la nature et de l’univers. 

À travers elles, l’alchimiste découvre notamment les rouages secrets orchestrant la vie et la mort.

C’est une voie de réflexion pour tenter de comprendre ce que le mythe de l’immortalité accordée par la pierre philosophale peut signifier…

Dans un prochain article, je vous montrerai comment s’y prennent concrètement les alchimistes pour réaliser de telles pierres dans leur laboratoire alchimique.

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